Emmanuel Levinas écrit dans un article sur son ami le Docteur Henri Nerson :
“Que les plus hautes valeurs de l’Occident doivent être reconnue comme appartenant de droit à la Thora, ce fut là une sagesse que Nerson tenait de son maître, de “M. Chouchani”. On ne saurait en effet parler de Nerson sans mentionner ce qui fut l’événement dominant et la grande joie de sa vie : sa rencontre et sa longue fréquentation d’un homme qui fut l’un des derniers géants du Talmud, probablement le plus grand depuis très longtemps, mais qui savait aussi enseigner, notamment, la physique nucléaire et trouver ses délices dans la lecture des traités des mathématiques classiques et modernes. Génie étrange et errant ! Dans l’enseignement talmudique que le docteur Nerson, à son tour, donnait autrefois à ses amis parisiens et dont bénéficiaient, jusque pendant sa maladie, ses amis en Israël, la pensée de “M. Chouchani”, dans sa nouveauté audacieuse, était toujours présente. Aux yeux de Nerson – et ce fut une confidence – tout l’invraisemblable de la mort se ramassait dans ce qui cependant était inévitable : la possibilité que le cerveau tel que celui de “M. Chouchani” puisse s’arrêter de penser”.
Extrait d’un texte paru dans Le Journal des Communautés en mai 1980